Décembre 2009 : inscription sur liste pour 2ème greffe

Le 20 août 2009, je vais apprendre une nouvelle que je redoute depuis 22 ans, soit le début de ma greffe (13/12/87). En effet j’ai rendez-vous avec mon néphrologue à Necker, qui me suit depuis le début, pour le bilan de mon greffon que je fais tous les 4 mois. Je dis volontaire « mon greffon » car depuis le 13 décembre 1987, je me le suis totalement approprié. Il faut dire que nous avons eu du temps pour nous apprivoiser. Cela fait donc 22 ans que nous partageons tout, cela représente la moitié de mon existence au moment de cette annonce. Mais cette belle histoire prend fin tout doucement, c’est ce que vient de m’annoncer mon médecin.

La créatinine augmente irrémédiablement depuis 2 – 3 ans et l’issue est désormais connue et sans appel. C’est le « rejet chronique ». Le greffon se détériore et c’est une chose inéluctable pour toutes les greffes. Ce n’est pas comme le bon vin qui, avec le temps se bonifie, non le greffon, lui, avec le temps, se dégrade.

Mon médecin me programme donc une consultation de pré-greffe avec le Professeur du service des transplantations rénales pour le 12 octobre, le lendemain de mes 45 ans. Quel cadeau !

Mon époux assistera avec moi à cette consultation car je suis bien sûr un peu anxieuse car je redoute la nouvelle de la reprise des dialyses en attendant cette deuxième greffe.

Le Professeur me rassure tout de suite. Ma créatinine n’est pas pour l’instant à un niveau trop élevé ce qui m’évite dans l’immédiat les dialyses. On va suivre son évolution durant les prochains mois en espérant une lente progression, si possible jusqu’à la greffe. Voilà tout l’avantage de s’inscrire sur la liste d’attente dès maintenant avant que la créatinine n’ait atteint des taux critiques.

Au cours de l’entretien, il me fait part de la possibilité de faire des greffes avec des donneurs vivants. Et de me parler de mon frère en insistant sur le fait que c’était une éventualité que l’on ne pouvait pas écarter…

Certes l’avantage d’une greffe à partir de donneur vivant est indéniable dans la mesure où l’opération pourra être programmé, on n’est plus alors dans la situation d’urgence de l’attente de l’appel téléphonique pour la greffe et le délai est ainsi raccourci. Par voie de conséquence, la durée de vie d’un greffon par donneur vivant est plus longue qu’avec donneur décédé car le greffon n’a pas le temps de souffrir après le prélèvement car le donneur et le receveur sont opérés en même temps. C’est le temps d’ischémie. Ce dernier est d’environ 2 heures lors d’une transplantation à partir de donneur vivant contre 20 à 24 heures lors d’une transplantation provenant de donneur décédé.

Mais si la situation n’est pas simple pour le donneur, elle n’est encore mois pour le receveur. Est-ce que l’on doit être redevable ?

Et en ce qui concerne mon frère, il est hors de question que je lui demande un tel acte de par sa situation familiale. En effet, ayant 5 enfants, qui sait ce que l’avenir nous réservera et s’il n’aura pas le geste à accomplir pour l’un de ses enfants.

Bien sûr, si mon cas avait nécessité une urgence vitale, nul doute qu’il aurait franchi le cap sans hésiter bien que ne supportant pas grand-chose de ce qui touche de près ou de loin à la médecine.

Et le 16 octobre, jour d’anniversaire de mon mari, celui-ci me déclare : « Moi je peux te donner un de mes reins ». Jamais je n’aurais cru vivre un moment aussi fort.

Ma première réaction fut de le dissuader en lui expliquant grossièrement ce qui allait se passer, la batterie d’examens pré-opératoires, la douleur de l’opération, du passage au Tribunal, des consultations avec les psychologues. Mais rien ne lui faisait peur… Sa décision semblait être prise et il irait au bout de sa démarche.

Il faut dire que les greffes entre conjoints ne sont possibles que depuis 2004.

Nous reprenons alors un nouveau rendez-vous avec le Professeur qui a lieu le 9 novembre. Il va lui confirmer le déroulement complet des choses, mais il insiste aussi sur les inconvénients engendrés par un tel geste pour son avenir, à savoir s’il est atteint un jour d’un cancer du rein ou s’il avait un accident de la route qui endommagerait son rein restant.

Il va aussi lui faire part des risques opératoires et notamment du non-fonctionnement de son rein donné si l’artère se bouche. C’es une situation à laquelle ils ne peuvent rien faire. Dans ce cas, non seulement mon mari aura été amputé d’un rein pour rien, mais moi je serai de nouveau en attente de greffe. Ce serait une situation très triste pour tous les deux et dure psychologiquement.

Nous commençons par faire le premier reste entre nous « le cross-match » qui va déterminer la compatibilité entre nous. Il s’agit de mettre en présence les cellules du donneur avec les sérums du receveur.

Si ce test est positif, ceci signifie que les cellules du donneur sont détruites par le sérum du receveur. De ce fait, la greffe est impossible. Si au contraire, le test est négatif, c’est que les cellules ne sont pas détruites, la greffe sera alors possible.

Résultat de ce test : un mois. L’attente va durer 3 mois et le résultat sera favorable malgré les anticorps que j’ai fabriqués, ça ne gêne en rien une transplantation entre nous.

Mon mari fait une première journée d’hospitalisation avec prise de sang, analyses d’urines, électrocardiogramme, radiographie pulmonaire, radiographie de l’abdomen, échographie rénale, échographie cardiaque et uroscanner rénal.

Cette journée d’examens marque le début des hostilités pour mon mari mais je le sens motivé et content d’accomplir ce geste pour moi. Le don de son vivant est un acte de générosité hors du commun, penser à l’autre avant d’évaluer les conséquences physiques et morales pour soi. Mais ne lui dites surtout pas qu’il est courageux, pour lui c’est un geste normal et n’importe qui devrait pouvoir le faire pour l’un de ses proches.

Puis, il va faire un holter tensionnel qui va révéler une hypertension sévère inconnue. S’en suivra une journée d’hospitalisation à Pompidou pour faire des examens plus précis  qui vont permettre de mesurer le débit de filtration glomérulaire et une scintigraphie rénale.

Il a donc été traité et la tension semble être stabilisée, à cette époque le don pouvait être encore possible. Mais depuis s’est rajouté un problème de suspicion de diabète qui nécessite aussi un traitement médicamenteux.

Conclusion : le projet de greffe entre nous est annulé mais l’important c’est nos santés respectives. Le don de vivant est un « bonus » et une expérience humaine que nous aurions aimé vivre mais ça ne se fera pas, ce n’est pas grave…

A ce jour, 04/01/2013, soit 3 ans après l’inscription sur la liste pour une deuxième greffe, ma créatinine ne cesse de faire le « yoyo » mais reste très correcte et l’appel n’interviendra pas pour le moment.

Bonne santé à tous !

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