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« J’ai donné un rein à mon mari » tiré de L’Express 10/10/2015

« En donnant un rein à mon mari, je redonnais une vie normale à tout mon foyer », raconte Béatrice. (Photo: Yvan, Béatrice et leurs enfants Maxime et Blandine.)

Le plus beau jour de la vie de Béatrice n’est pas le jour de son mariage avec Yvan, mais celui où elle a su qu’elle allait lui offrir un rein. Récits croisés à l’occasion de la journée européenne du don d’organes et de la greffe ce samedi

Yvan dit parfois qu’il a sa « femme dans la peau ». Littéralement. Il y a deux ans et demi, Béatrice, 44 ans, lui a donné un rein. Lors de l’été 2007, son époux « qui n’était jamais malade », raconte-t-elle, se sent très fatigué. Il met ça sur le compte de son nouvel emploi et d’un déménagement du Nord-Pas-de-Calais à la région rouennaise. Lorsque cet assureur de 45 ans finit par consulter, le couperet tombe: Yvan est atteint du Syndrome hémolytique et urémique (SHU) atypique, une maladie rare qui touche une personne sur un million et détériore les reins. Il est hospitalisé dans la foulée, son pronostic vital est engagé.

Une fois tiré d’affaire il finira par se faire dialyser trois fois par semaine. « Presque chaque mois, ma femme demandait au médecin: ‘mais vous êtes sûr que je ne peux pas lui donner un rein?' » Pendant cinq ans, la réponse est négative: la maladie dont Yvan est atteint « a plus de 90% de risques de récidiver sur le greffon », raconte sa femme.

Jusqu’au jour où l’arrivée d’un nouveau médicament, le Soliris, change la donne. « La néphrologue nous avait parlé d’un colloque sur cette maladie et ses nouveaux traitements qui allait se tenir à Paris. Elle ne pouvait malheureusement pas y aller mais nous a conseillé de nous y rendre », raconte Béatrice. Le couple prend le train direction la capitale. Sur place, la mère de famille demande aux spécialistes présents si le médicament va pouvoir permettre à son mari d’obtenir une greffe. Cette fois, la réponse est positive. « J’étais tellement heureuse et étonnée que j’ai posé la question deux fois, ils ont dû se dire que je ne comprenais rien », se souvient-elle, amusée.

Aussi « compatibles » dans la vie que sur le plan médical

Par chance, cette dernière apprend quelques mois plus tard qu’elle est compatible avec son mari après une batterie de tests. « Ça a été le plus beau jour de ma vie », assure celle qui a épousé le garçon rencontré à 17 ans sur les bancs du lycée. De toute façon, il n’aurait pu en être autrement: Béatrice était sûre qu’ils étaient aussi « compatibles » dans la vie que sur le plan médical. « Nous avons toujours été très fusionnels », confirme son époux.

Mais, accepter un rein est « une grosse responsabilité » et Yvan s’inquiète. Il a peur que sa femme souffre, ou que le rein qui lui restera puisse un jour être malade. Béatrice, elle, ne se pose pas de question: ce don est une « évidence ». « J’avais beaucoup de mal à voir que l’une des personnes que j’aime le plus au monde souffrait, épuisé par ses dialyses. En lui donnant mon rein, je redonnais une vie normale à mon mari et à tout mon foyer », souligne cette maman de deux enfants.

« Ça ne l’empêche pas de bouder s’il n’est pas content »

Aujourd’hui Maxime, 19 ans et Blandine, 16 ans, « qui ont été extra pendant toutes ces années, s’autorisent enfin à vivre leur vie d’ado », se réjouit Yvan. Pendant ce temps, le couple prépare la naissance d’un « nouveau bébé ». L’idée de travailler ensemble, alors que Béatrice avait quitté son emploi de secrétaire médicale pour élever leurs enfants, leur trottait dans la tête depuis « très longtemps ». Ils ont finalement sauté le pas et ouvriront à la fin du mois un magasin de chocolats.

Hormis ce projet commun, le don n’a rien changé à leur relation, assure le couple. « Nous n’en parlons presque pas et ça ne vient jamais sur le tapis en cas de dispute. Ça ne l’empêche pas de bouder s’il n’est pas content et moi non plus! Et nous ne sommes pas plus, ni moins fusionnels qu’avant », précise Béatrice, qui a elle aussi son mari « dans la peau ». Une trace du don qui pour elle, est « la plus belle des cicatrices ».

• 12 octobre 2015


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