Le bistouri ne sert à »rein » ?
Article pris sur le site Allo Docteur
Extraire le rein « à la main » plutôt que d’utiliser des instruments de chirurgie pour une néphrectomie chez un donneur, réduit les risques postopératoires et accélère la récupération physique du donneur après la chirurgie, d’après une étude britannique. Le Pr Nadey Hakim, chef de service de l’unité de transplantation de l’Imperial College Healthcare de Londres, à l’origine de cette étude, n’en est pas à son premier exploit…
Une technique ancestrale pour extraire le futur greffon rénal
Le Pr Nadey Hakim, chirurgien émérite diplômé de la Faculté de médecine de Paris-Descartes est actuellement chef de service de l’unité de transplantation de l’Imperial College Healthcare de Londres. Ce chirurgien spécialisé en chirurgie bariatrique (obésité) et de transplantation, a notamment lancé avec succès le premier programme de greffe du pancréas dans le sud-est de l’Angleterre, participé à la première greffe de bras au monde (1998) et reçu en 2007 le prix de recherches J. Wesley Alexander dans le domaine de la transplantation.
Pour éviter la cicatrice abdominale de 8 cm de néphrectomie, une autre technique chirurgicale en vogue consiste à faire passer le rein par voie vaginale en incisant la partie postérieure du vagin.
Ce chirurgien chevronné ne se contente pas de cela. D’octobre 2000 à novembre 2008, il a évalué les conséquences de la technique de néphrectomie par « assistance des doigts » chez un donneur de rein. Cette technique consiste à extraire le rein d’un donneur avec les doigts du chirurgien sans utiliser d’instrument de chirurgie. La cœlioscopie, technique la plus couramment utilisée jusqu’alors, nécessite entre 2 à 3 heures d’opération et laisse 4 à 5 cicatrices de 1,5 cm pour faire passer les instruments et une cicatrice de 8 cm pour l’extraction finale de l’organe.
Pendant ces huit ans de recherche, le Pr Hakim a opéré avec ses confrères 359 patients donneurs en utilisant cette technique plus « ancestrale » d’extraction du rein avec ses doigts, plutôt que d’utiliser les derniers outils de chirurgie. Sur 30 centres de transplantation britanniques, son centre est le seul pour l’instant à utiliser cette technique chirurgicale.
Extraire le rein avec les doigts diminue les complications postopératoires
Comparé à la technique par cœlioscopie, la néphrectomie par « assistance des doigts » a permis de diminuer les complications postopératoires, d’accélérer la récupération physique des donneurs après la chirurgie, de réduire le temps opératoire à 117 minutes en moyenne et la cicatrice à 3,5 cm au minimum.
Le Pr Hakim souligne qu’en extrayant le rein avec les mains, l’organe est moins longtemps séparé de ses vaisseaux, comparativement à la technique par cœlioscopie, réduisant considérablement les risques de lésions du futur greffon.
« La cœlioscopie est une technique respectable, mais non dénuée de risques. Les techniques plus anciennes méritent qu’on leurs accorde une certaine attention », précise le chirurgien.
« Moins il y aura de complications postopératoires, plus on aura de donneurs de reins, ce qui est primordial pour les 6.000 patients sur liste d’attente de greffes rénales », conclut le passionné de médecine.
Source : A Fast and Safe Living Donor “Finger-Assisted” Nephrectomy Technique: Results of 359 Cases. N. Hakim and coll. Transplantation Proceedings. Volume 42, Issue 2. Pages 165-170, January 2010